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Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2011-2012
Compte rendu intégral
Séance du mardi 13 décembre 2011
Limite d’âge des magistrats de l’ordre judiciaire
Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’un projet de loi organique
Motion de renvoi en commission
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Hunault, pour le groupe Nouveau Centre.
M. Michel Hunault. Manifestement, le parti socialiste est embarrassé. Notre excellent collègue Raimbourg, qui connaît bien les questions de justice, apparaît en effet bien esseulé : il est le seul membre du groupe SRC à être présent en séance publique.
Cher collègue Raimbourg, le texte que nous examinons vise à améliorer le statut des magistrats. Vous dénoncez des cavaliers législatifs, mais, s’ils apportent une amélioration, peu importe. On peut être dans l’opposition et reconnaître les avancées proposées par le Gouvernement.
Par ailleurs, vous voulez interdire l’attribution de certaines décorations aux magistrats. En tant qu’ancien avocat, renommé, vous connaissez pourtant les mérites de ces derniers, qui vouent leur vie à la justice. Pourquoi vouloir les priver de toute distinction ? Cette question fera partie du débat présidentiel, dites-vous. Chiche ! Nous aurons en effet l’occasion, dans les mois qui viennent de faire le bilan de cette législature ainsi que de la précédente. Nous pourrons ainsi évoquer l’augmentation du budget de la justice – vous vous êtes opposés à tous les textes – ou les avancées dont ont bénéficié les garanties individuelles. Surtout, je veux saluer, au nom de mes collègues du groupe du Nouveau centre, M. le garde des sceaux, qui a le désir personnel d’améliorer les conditions de travail et le recrutement des magistrats, dont la mission est difficile et le rôle essentiel pour la cohésion de notre pays.
Aussi avez-vous eu, mon cher collègue, des mots malheureux – qu’il faut sans doute mettre sur le compte de l’improvisation – en évoquant l’âge des magistrats qui, en fin de vie, coûteraient plus cher aux finances de la nation. Ces mots, qui resteront au Journal officiel, sont quelque peu vexatoires et déplacés lorsqu’on sait la noblesse de la fonction des magistrats.
(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n’est pas adoptée.)
Discussion générale
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Hunault.
M. Michel Hunault. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme cela a été fort bien dit par M. le garde des sceaux, M. le rapporteur et notre collègue Gosselin, nous débattons, un an après la réforme des retraites, d’un projet de loi organique relatif à la limite d’âge des magistrats de l’ordre judiciaire, la question étant de savoir s’il est opportun de relever cette limite d’âge.
Les dispositions que le Gouvernement nous propose de voter découlent de la loi portant réforme des retraites qui, dans une démarche de responsabilité vis-à-vis des générations futures, et afin d’assurer l’équilibre financier du système, avait, d’une part, relevé de 60 à 62 ans l’âge d’ouverture de droits à la retraite en 2018 et, d’autre part, relevé l’âge auquel est attribuée une retraite à taux plein. Cette réforme avait, je le rappelle, recueilli l’approbation unanime des députés du Nouveau Centre.
Suite à cette réforme, un projet de loi organique, adopté par notre assemblée l’an passé, avait reculé la limite d’âge des magistrats de deux années. Afin de garantir le maintien de l’indépendance de l’autorité judiciaire contre des modifications de circonstance, la Constitution prévoit, en son article 64, de recourir à un projet de loi organique distinct lorsqu’il s’agit de modifier le statut des magistrats et leurs limites d’âge. C’est là une garantie fondamentale de l’indépendance des magistrats, ce qui justifie que la commission des lois ait été saisie de ce texte.
Le projet de loi organique que nous examinons ne remet pas en cause la limite d’âge prévue par la loi du 10 novembre dernier, mais en modifie le calendrier. En effet, elle vise à appliquer aux magistrats l’accélération proposée récemment par le Gouvernement dans le cadre de la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 du calendrier de relèvement de l’âge d’ouverture des droits à la retraite. Ainsi, la limite d’âge à 67 ans s’applique désormais pleinement pour les magistrats nés à compter de 1955.
L’article 1er de ce texte définit donc les modalités d’élévation progressive de la limite d’âge pour les magistrats nés après 1952. En revanche, il ne porte pas sur l’âge d’ouverture des droits à pension des magistrats, qui demeure, je le rappelle, fixé à 62 ans, conformément à la loi portant réforme des retraites. Je vous confirme, monsieur le garde des sceaux, que les députés du Nouveau Centre voteront cette réforme.
Je veux saluer le choix du Gouvernement d’avoir fait figurer dans ce projet de loi des dispositions qui me paraissent très utiles – contrairement à notre collègue Raimbourg, qui n’y voit que des cavaliers législatifs. Ainsi, les dispositions visant à la mobilité des magistrats, à la création d’un comité médical, à l’accès à la Cour de cassation, constituent très objectivement, des progrès attendus pour les magistrats.
M. Philippe Gosselin. Bien sûr !
M. Michel Hunault. Pour justifier l’opposition du groupe socialiste au texte, M. Raimbourg a évoqué l’indépendance des magistrats. Monsieur le garde des sceaux, les débats relatifs aux élections présidentielle et législatives vont nous donner l’occasion d’évoquer cette question. Pour ma part, je considère que c’est faire injure à l’ensemble des magistrats de France que de remettre sans cesse en cause leur indépendance. La mission confiée aux magistrats, consistant à appliquer la loi, est extrêmement difficile. Les magistrats du parquet veillent, en ce qui les concerne, à l’uniformité de l’application de la politique pénale voulue par le Gouvernement et la majorité. Je crois que remettre systématiquement en cause leur indépendance équivaut à les insulter.
Je me réjouis que l’amendement visant à faire des magistrats la seule catégorie de Français ne pouvant avoir l’honneur de se voir décerner certaines décorations par la République – notamment l’ordre de la Légion d’honneur ou l’ordre national du Mérite – soit retiré. Le dévouement de ces hommes et de ces femmes, contribuant à assurer la cohésion de la Nation, n’est plus à démontrer, eux qui, bien souvent, ont accompli 35 heures de travail dès le mercredi – et en font évidemment autant durant la deuxième moitié de la semaine –, eux qui permettent que des audiences se tiennent jusque tard le soir, avec le concours des greffiers.
Le texte que nous examinons a pour objet de régler un problème difficile, celui consistant à assurer la pérennité des retraites. Il me semble que, dès lors, nos collègues de l’opposition auraient été bien avisés de montrer davantage de prudence. Qui a eu le courage de mettre en œuvre une réforme des retraites au cours des dix dernières années, si ce n’est l’actuelle majorité ? Cette réforme a pour objet de préserver le financement du système de retraite par répartition, dans lequel les personnes qui travaillent payent la retraite de ceux qui ne travaillent plus.
En Europe, des gouvernements socialistes qui avaient remis en cause le nombre de fonctionnaires, abaissé le montant des pensions, retardé l’âge de la retraite, ont été balayés par les électeurs. Vous, monsieur le garde des sceaux, pouvez être fier de disposer d’une majorité qui vous défend. Nous aurons, dans les semaines à venir, un débat devant le peuple français, qu’il n’est sans doute pas inutile de commencer dès maintenant, dans notre hémicycle. C’est pourquoi, au nom du groupe Nouveau Centre, je vous apporte notre soutien. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Article 3
Mme la présidente. Mes chers collègues, vous êtes nombreux à avoir demandé la parole sur ces amendements. Je vous demanderai donc de respecter scrupuleusement le temps qui vous est imparti.
La parole est à M. Michel Hunault.
M. Michel Hunault. Comme je me suis exprimé dans la discussion générale sur cette disposition, je serai bref. Je souhaiterais non seulement que l’on vote ces deux amendements – je fais miennes, à cet égard, les réflexions du garde des sceaux et des auteurs des amendements –, mais aussi que l’opposition, qui est à l’origine de la disposition en question, revienne sur sa position. Il faut que nous levions cette suspicion envers les magistrats.
M. Jean-Paul Garraud. Très bien !
M. Michel Hunault. L’unité de la représentation nationale peut conforter un corps professionnel. Il serait bon qu’il y ait un peu de sérénité ; nous devrions trouver un accord pour que ces amendements soient votés à l’unanimité.